Gouvernance numérique au Bénin : bâtir un écosystème digital de confiance à l’ère de la transformation numérique et de la cybersécurité

Gouvernance numérique au Bénin : bâtir un écosystème digital de confiance à l’ère de la transformation numérique et de la cybersécurité

À l’ère de la transformation numérique, la gouvernance numérique devient un enjeu stratégique majeur pour les pays en développement, dont le Bénin. Alors que les nouvelles technologies ouvrent des perspectives inédites pour l'innovation, l'économie et la société, elles viennent également avec leur lot de défis, notamment en matière de cybersécurité. Dans un monde de plus en plus interconnecté, la protection des données, la sécurité des infrastructures numériques et la régulation des pratiques numériques deviennent des priorités pour garantir un environnement de confiance.

Le Bénin, conscient de l'importance de cette évolution, a mis en place une série d'initiatives visant à renforcer la gouvernance numérique à travers des réformes législatives, des investissements dans l'infrastructure technologique et des politiques publiques innovantes. Cependant, la route vers une gouvernance numérique optimale est semée d'obstacles, parmi lesquels figurent la gestion des risques cybernétiques, la formation des citoyens et des acteurs institutionnels, ainsi que l'adaptation rapide aux technologies émergentes. Pour en parler, Africa CyberSecurity Mag a le plaisir de recevoir M. Marc André LOKO, Directeur Général de l’Agence des Systèmes d'information et du Numérique (ASIN) Bénin. Avec lui, nous abordons les stratégies mises en place pour construire une gouvernance numérique robuste et sécurisée, et les perspectives pour un avenir numérique prometteur.

Africa CyberSecurity Mag : L’ASIN joue un rôle central dans la transformation numérique du Bénin, notamment en modernisant les services publics et en assurant une gouvernance efficace du numérique. Quels sont les principaux progrès réalisés jusqu’à présent dans cette transition et quels défis restent à relever ?

Marc-André LOKO : Le Bénin, à l’image de nombreux pays africains, a compris à quel point le numérique est stratégique et indispensable pour sa transformation économique. Des stratégies ambitieuses sont mises en œuvre depuis plusieurs années. La plupart des infrastructures critiques nécessaires ont été installées. La fibre optique a été déployée sur près de 3 000 km à travers le pays. L’accent a été mis sur l’aménagement numérique du territoire et sur la connectivité mobile. Une infrastructure SOC a été mise en place pour assurer l’interopérabilité entre les systèmes d’information. Le portail national des services publics permet désormais aux citoyens d’accéder à plus de 230 services en ligne. Un datacenter national a été créé pour héberger des données aux standards internationaux. La plateforme nationale de paiement électronique, déployée depuis l’année dernière, intègre progressivement les paiements liés aux services publics digitalisés. Le défi principal est aujourd’hui de favoriser l’adoption effective de ces services.

Africa Cybersecurity Mag : La cybersécurité des infrastructures publiques est un enjeu critique. Quelles sont les principales actions mises en place par l’ASIN pour protéger les systèmes d’information de l’État contre les cybermenaces ?

Marc-André LOKO :

Africa Cybersecurity Mag : La coopération entre institutions est essentielle pour renforcer la sécurité numérique. Comment l’ASIN travaille-t-elle avec le CNIN, les institutions internationales et le secteur privé pour sécuriser l’écosystème numérique du Bénin ? Ou le CNIN est-il une entité à part ?

Marc-André LOKO : Le Centre National d'Investigation Numérique (CNIN) est en charge de la lutte contre la cybercriminalité. La collaboration est quotidienne. Des informations issues de la veille technologique peuvent mener à des enquêtes nécessitant l’appui du Centre d’alerte et de réponse aux incidents (CERT). Les deux agences mutualisent leurs infrastructures pour éviter les duplications. Cette coopération inclut également l’Autorité de Protection des Données à caractère Personnel (APDP), l’Agence Nationale d’Identification des Personnes (ANIP) et l’ARCEP. Un exemple marquant est la campagne d’identification des utilisateurs mobiles : sans identification, une carte SIM ne peut plus fonctionner. Tous les acteurs ont travaillé ensemble pour garantir la fiabilité et la sécurité des données collectées.

Africa Cybersecurity Mag : L’éducation numérique et la sensibilisation à la cybersécurité sont essentielles pour accompagner la transformation digitale. Quelles initiatives sont mises en place par l’ASIN pour renforcer la culture numérique et la confiance des citoyens dans les services en ligne ?

Marc-André LOKO :  Plusieurs programmes visent différents publics. Le programme PARE( Protégé, Alerté, Responsabilisé), soutenu par l’Agence de développement du Luxembourg, finance depuis trois ans des campagnes de sensibilisation dans les écoles et lycées, avec l’appui de la police républicaine. Une plateforme de e-learning a été développée pour les lycéens et reste accessible à tous.Les universités bénéficient d’un réseau béninois d’éducation et de recherche reliant déjà 100 000 étudiants. Des sessions de sensibilisation sont aussi organisées dans les entreprises, les banques et les administrations publiques, y compris auprès des parlementaires afin qu’ils légifèrent en tenant compte des évolutions rapides du numérique.

D’autres cibles stratégiques, comme la police et le haut commandement militaire, sont également concernées. Un effort particulier reste à faire pour toucher les populations ne parlant pas français, en développant des contenus en langues nationales.

Africa CyberSecurity Mag : Monsieur le DG, un mot pour conclure cette interview ?

Marc-André LOKO : De nombreux efforts ont été réalisés ces dernières années. La plupart des pays africains sont engagés dans cette dynamique, ce qui favorise le partage d’expériences et de savoir-faire. L’objectif est que le numérique devienne un véritable levier de transformation et de création de valeur, avec un impact positif concret sur la vie quotidienne.

Propos recueillis par Christelle HOUETO, journaliste digital